Québec Yachting

Sous le charme des côtes de Turquie

Bel exemple des plans d'eau de la côte lycienne. L’image a été prise du sommet de la forteresse de Kale Koy, Kekova.

Bel exemple des plans d’eau de la côte lycienne. L’image a été prise du sommet de la forteresse de Kale Koy, Kekova.

Nous sommes le 28 septembre 2014. Ancrés dans la baie de Kékova, sur la côte lycienne, notre campagne entamée début mai s’achève. De fait, Hilda et moi prévoyons amorcer notre retour demain avec l’arrivée des vents du sud favorables à notre remontée vers Marmaris au nord-ouest, notre port d’attache.

Au cours des dernières semaines, nous avons exploré les côtes cariennes et lyciennes de Turquie, de Datça, notre port de nouvelle entrée en Turquie, à Kékova. Nous aurons ainsi parcouru plus de 300 milles nautiques et réalisé plus d’une vingtaine d’escales : la plupart des ancrages idylliques et quelques arrêts dans de petites villes portuaires combien sympathiques, notamment à Gocek, Kalkan, Kas et Kale Koy. Nous nous sommes également arrêtés à de petits restaurants, parfois accessibles strictement par la mer, nous offrant leurs pontons à la façon typiquement turque.

Gulet turc au mouillage sur l'un des nombreux sites archéologiques de Kékova.

Gulet turc au mouillage sur l’un des nombreux sites archéologiques de Kékova.

La beauté des lieux n’a d’égale que son achalandage. Nous sommes nombreux ici sur l’eau. Les grands opérateurs de charter y sont tous représentés avec des bases à Marmaris, Bodrum et Gocek. Les gulets, ces goélettes turques, sortes de caïques de bois, sont également omniprésentes. On peut en tout temps en repérer une dizaine d’un seul coup d’œil. Ici, la voile est facilement accessible dans une infinité de formules. Vous pouvez louer en formule charter, avec ou sans capitaine, naviguer solo ou en flottille en toute confiance avec un bateau amiral accompagnateur et un ingénieur en permanence en cas de bris mécanique. Tous les formats sont disponibles de 32 à 57 pieds et bien plus : monocoques, multicoques, voiliers, yacht, et gulets à la cabine ou en charter. À ce chapitre, nous vous recommandons SK Yachting (puisque nous les connaissons bien), basés à Marmaris, pour leurs voiliers et catas super bien préparés, leur amabilité et leurs prix très compétitifs. Vous pouvez, si vous en avez les moyens, vous offrir un super-yacht de 40 m ou plus, avec 5 à 15 membres d’équipage, pouvant accueillir 4 à 20 passagers, et ce, à des prix variant de 50 000 à 350 000 euros par semaine! Vous êtes sceptique? Alors, allez voir « The Cloud » sur Google.

Mais à parcourir et à apprécier les côtes turques et leur peuple, on comprend bien comment une telle offre a pu se développer au fil des années.

Pour vous en donner une petite idée, de Datça à Marmaris, plus à l’est, nous explorons la côte carienne. Comme des doigts qui s’avancent en mer Égée pour s’approcher à quelques milles nautiques seulement des îles grecques, notamment de Symi, la côte offre une infinité de mouillages sécuritaires et facilement accessibles. De nombreux restaurants s’y sont installés avec leurs pontons pour accueillir les visiteurs. L’approvisionnement de ces restaurants se fait souvent par bateau et l’électricité provient d’une génératrice. Le personnel couche dans des abris temporaires ou sur de petits bateaux de pêche réaménagés.

Les plats sont traditionnels et simples, mais généralement savoureux. Le fameux mezzé, servi à volonté en formule buffet et offert en entrée est constitué d’une variété de petits plats à base de courges, d’aubergines, de fèves marinées, feuilles de vigne, poissons et fruits de mer marinés. On y offre en plats principaux une grande variété de poissons locaux toujours grillés sur feu de bois, des calmars et de la pieuvre fraîche. L’agneau et la chèvre grillée ou en casserole sont délicieux. Le tout à petits prix variant entre 40 $ et 80 $ CA pour deux personnes, incluant une bouteille de vin, taxes et pourboire. De plus, vous n’aurez pas eu à payer de quaiage! Une économie de 30 $ à 60 $ CA! À éviter toutefois… le délice des super-yachts : le homard offert à 60 $ CA le demi-homard! C’est qu’il est importé du Canada!

Le combien sympathique marché itinérant de Datça et ses étals cordés sur plus de 500 m dans les rues de la ville. On le retrouve le vendredi à Kalkan et le samedi à Kas, plus à l'est.

Le combien sympathique marché itinérant de Datça et ses étals cordés sur plus de 500 m dans les rues de la ville. On le retrouve le vendredi à Kalkan et le samedi à Kas, plus à l’est.

Sur la côte carienne, nous passerons quelques jours à Datça pour profiter du marché hebdomadaire et refaire nos provisions. Ici, on trouve de tout : fruits en abondance, herbes fraîches et épices, en passant par les fromages fermiers et les viandes fraîches. Il n’est pas rare qu’en voulant acheter deux citrons, le marchand vous les offre gratuitement. C’est qu’il vend au kilo, voyez-vous! Les Turcs sont avenants, gentils et honnêtes. Ce sont aussi de grands commerçants ne négligeant aucun moyen pour vous convaincre et toujours prêts à négocier. Il faut parfois s’armer de patience.

Nous arrêterons ensuite dans la baie de Bozuk Kale, au restaurant Loryma, un petit havre de paix, pour revoir Békir devenu un ami depuis notre première visite en 2007. La baie est coiffée depuis son entrée d’une imposante citadelle datant de plus de 1000 ans, animée par la présence d’un troupeau de chèvres sauvages et de son berger. Nous y passerons quelques jours pour apprécier le calme et nous offrir une pause.

Le littoral découpé de la côte carienne offre des paysages dramatiques de par leur couleur rouge brûlé et leur côté désertique. Des sommets à 2000 m plongent dans la mer offrant un spectacle à couper le souffle. Les eaux y sont généralement claires, cristallines et souvent turquoise en régions peu profondes.

L’impressionnant ensemble de tombes sculptées de la côte lycienne, à l'approche de Dalyan.

L’impressionnant ensemble de tombes sculptées de la côte lycienne, à l’approche de Dalyan.

Nous quittons Loryma et saluons Békir pour la baie d’Ekincik, à l’est de Marmaris, à la découverte d’un nouveau littoral : la côte lycéenne. Après avoir passé un premier soir à la marina My Marina, plutôt huppée et chère, nous jetons l’ancre au fond de la baie d’Ekincik tout aussi agréable. La baie se caractérise par une plage de sable de 6 km à l’est où viennent se reproduire chaque année quelques milliers de tortues de mer. Cette plage résulte de l’ensablement de la rivière Dalyan devenue un delta. En remontant la rivière, on découvre Kaunos, une importante cité côtière de l’Antiquité avec son installation portuaire devenue un lac intérieur en raison de son ensablement. La remontée du delta de Dalyan en caïque affrété pour l’occasion est un moment marquant et mémorable de notre séjour sur les côtes turques. Les étroits passages en méandres dans de hautes herbes sur fond montagneux offrent un paysage incomparable, presque émouvant. La visite de Kaunos impressionne également par l’ampleur de l’ouvrage et son amphithéâtre assez bien préservé de 4000 sièges datant du 4e siècle av. J.-C. Du sommet, les vestiges de cette cité sont à perte de vue, permettant d’imaginer l’ampleur de l’activité humaine qu’il y a pu avoir ici. Enfin, la poursuite de la remontée du delta nous réserve une autre surprise : celle du Tombeau des Rois, un ensemble de tombes monumentales sculptées à même les parois rocheuses à quelques centaines de mètres du sol. Difficile d’imaginer comment ces ouvrages ont pu être réalisés. Sur le retour, nous pourrons apprécier l’importante faune qui vit dans le delta et apercevoir une grande tortue de mer s’alimenter de crabes lancés par un pêcheur. Nous nous arrêterons à la plage pour voir les sites de nidification de tortues. Journée mémorable pour Hilda et moi qui aurons d’ailleurs la chance d’apercevoir par la suite quelques autres tortues.

Nous repartons le lendemain pour le golfe de Gocek afin de refaire nos provisions et visiter quelques-uns de ses nombreux ancrages. Ici, nous retrouvons la végétation, les arbres et les baies ombragées. Les parois sont abruptes et les profondeurs importantes, ce qui nous force à nous ancrer dos à la rive et en s’y attachant solidement. Comme nous devons répéter l’opération presque chaque jour, nous en profitons pour améliorer notre technique et notre coordination!

De Gocek, où nous aurons passé quelques jours dans des ancrages tous plus beaux les uns que les autres, nous poursuivons notre route vers l’est en profitant des vents d’ouest. La navigation est fort agréable à la mi-septembre. La température est élevée, l’eau est fraîche mais très confortable et les vents varient de B3 à B6, ce qui entraîne des passages rapides et sécuritaires. Nous en profitons pour sortir le spi à quelques occasions.

Nous nous arrêtons à Olu Deniz. Le temps étant beau, nous décidons de nous ancrer face à l’ouest pour nous offrir un coucher de soleil sur la mer. En mer Égée, le meltemi souffle de WNW et peut atteindre B7-8-9 en juillet et en août, ce qui nous oblige à nous mettre à l’abri sous le vent des îles et des côtes, nous privant ainsi de magnifiques couchers de soleil. Nous aurons tout de même payé cher notre coucher de soleil à Olu Deniz puisque le meltemi n’étant pas tout à fait terminé en septembre, nous nous sommes retrouvés en travers de la vague restante et avons roulé toute la nuit!

Nous nous sommes par la suite arrêtés successivement à Kalkan et à Kas, deux petites villes portuaires avec leurs charmes bien distinctifs. Les installations portuaires sont compactes et laissent peu de place pour manœuvrer. Nous nous promettons toutefois d’y revenir sur le retour.

Enfin, nous repartons pour Kekova Roads dont on nous a tant parlé.

Bel exemple de sarcophages lycéens répartis de façon aléatoire tout le long de la côte lycienne.

Bel exemple de sarcophages lycéens répartis de façon aléatoire tout le long de la côte lycienne.

Nous quittons Loryma et saluons Békir pour la baie d’Ekincik, à l’est de Marmaris, à la découverte d’un nouveau littoral : la côte lycéenne. Après avoir passé un premier soir à la marina My Marina, plutôt huppée et chère, nous jetons l’ancre au fond de la baie d’Ekincik tout aussi agréable. La baie se caractérise par une plage de sable de 6 km à l’est où viennent se reproduire chaque année quelques milliers de tortues de mer. Cette plage résulte de l’ensablement de la rivière Dalyan devenue un delta. En remontant la rivière, on découvre Kaunos, une importante cité côtière de l’Antiquité avec son installation portuaire devenue un lac intérieur en raison de son ensablement. La remontée du delta de Dalyan en caïque affrété pour l’occasion est un moment marquant et mémorable de notre séjour sur les côtes turques. Les étroits passages en méandres dans de hautes herbes sur fond montagneux offrent un paysage incomparable, presque émouvant. La visite de Kaunos impressionne également par l’ampleur de l’ouvrage et son amphithéâtre assez bien préservé de 4000 sièges datant du 4e siècle av. J.-C. Du sommet, les vestiges de cette cité sont à perte de vue, permettant d’imaginer l’ampleur de l’activité humaine qu’il y a pu avoir ici. Enfin, la poursuite de la remontée du delta nous réserve une autre surprise : celle du Tombeau des Rois, un ensemble de tombes monumentales sculptées à même les parois rocheuses à quelques centaines de mètres du sol. Difficile d’imaginer comment ces ouvrages ont pu être réalisés. Sur le retour, nous pourrons apprécier l’importante faune qui vit dans le delta et apercevoir une grande tortue de mer s’alimenter de crabes lancés par un pêcheur. Nous nous arrêterons à la plage pour voir les sites de nidification de tortues. Journée mémorable pour Hilda et moi qui aurons d’ailleurs la chance d’apercevoir par la suite quelques autres tortues.

Nous repartons le lendemain pour le golfe de Gocek afin de refaire nos provisions et visiter quelques-uns de ses nombreux ancrages. Ici, nous retrouvons la végétation, les arbres et les baies ombragées. Les parois sont abruptes et les profondeurs importantes, ce qui nous force à nous ancrer dos à la rive et en s’y attachant solidement. Comme nous devons répéter l’opération presque chaque jour, nous en profitons pour améliorer notre technique et notre coordination!

De Gocek, où nous aurons passé quelques jours dans des ancrages tous plus beaux les uns que les autres, nous poursuivons notre route vers l’est en profitant des vents d’ouest. La navigation est fort agréable à la mi-septembre. La température est élevée, l’eau est fraîche mais très confortable et les vents varient de B3 à B6, ce qui entraîne des passages rapides et sécuritaires. Nous en profitons pour sortir le spi à quelques occasions.

Nous nous arrêtons à Olu Deniz. Le temps étant beau, nous décidons de nous ancrer face à l’ouest pour nous offrir un coucher de soleil sur la mer. En mer Égée, le meltemi souffle de WNW et peut atteindre B7-8-9 en juillet et en août, ce qui nous oblige à nous mettre à l’abri sous le vent des îles et des côtes, nous privant ainsi de magnifiques couchers de soleil. Nous aurons tout de même payé cher notre coucher de soleil à Olu Deniz puisque le meltemi n’étant pas tout à fait terminé en septembre, nous nous sommes retrouvés en travers de la vague restante et avons roulé toute la nuit!

Nous nous sommes par la suite arrêtés successivement à Kalkan et à Kas, deux petites villes portuaires avec leurs charmes bien distinctifs. Les installations portuaires sont compactes et laissent peu de place pour manœuvrer. Nous nous promettons toutefois d’y revenir sur le retour.

Enfin, nous repartons pour Kekova Roads dont on nous a tant parlé.

Ce qu’il faut retenir des côtes de Turquie

  1. Un plan d’eau plus facile à naviguer en comparaison des îles grecques plus venteuses et imprévisibles et dont les mouillages sont plus distants.
  2. Un peuple charmant et accueillant, honnête et avenant.
  3. Des paysages spectaculaires et contrastés. La côte carienne aride contraste avec la côte lycéenne couverte de verdure.
  4. Mai, septembre et octobre sont les mois les plus propices.
  5. Juillet et août se caractérisent par une température très élevée approchant les 40 degrés et des mouillages encombrés. Vous devrez arriver plus tôt à destination pour vous assurer une place sécuritaire.
  6. Il faut deux semaines minimum et idéalement trois semaines pour apprécier pleinement la région et amortir les frais et les temps de déplacement.
  7. Toutes les formules de location et de types d’embarcations sont disponibles en abondance ici et faciles à consulter sur le Web.
  8. Si vous optez pour un gulet et que vous souhaitez naviguer à voile, alors informez-vous, car peu de gulets utilisent des voiles, même s’ils conservent leurs mâts.
  1. Le coût de la vie est très abordable.
  2. La situation à ce jour en regard du conflit islamique est stable. Toutefois, la proximité frontalière de l’EI et l’engagement récent de la Turquie dans la coalition pourraient changer la donne. À suivre!

Hilda et Jacques sur Dance Me

Hilda et Jacques naviguent en Méditerranée depuis 2005. Pour tout commentaire ou toute information supplémentaire, n’hésitez pas à leur écrire à j.chalifour@chalifourcom.com.

Par Jacques Chalifour. Photos : Hilda Luyt.

*Reportage publié dans le magazine Hiver 2015 de Québec Yachting.