Québec Yachting

Navigation au lac Champlain

The Gut, Vermont. Crédit photo : Gratien Courtois.

Le magazine Québec Yachting a eu le plaisir d’assister à une conférence de l’École de navigation de la Société de sauvetage sur la navigation au lac Champlain, créée par Mario Mercille et présentée par Luc Bernuy, le 12 avril dernier. Il est aussi conférencier et l’auteur de L’Intracostal, le guide, dont la 4e édition a été mise sur le marché dernièrement et a fait l’objet d’une chronique Lecture de Monique Reeves dans le magazine Printemps 2018.

Le lac Champlain est situé à environ une heure de Montréal. Bien qu’au nord la baie Missisquoi ait élu résidence au Québec, la grande majorité de ses 210 kilomètres de longueur se trouve aux États-Unis, dans les États du Vermont et de New York. Ce lac est la sixième plus grande étendue d’eau douce du territoire américain avec ses 70 îles, ses 31 affluents et sa profondeur qui peut atteindre jusqu’à 122 mètres (400 pieds). Il est entouré de montagnes autant à l’est (Appalaches et Vallée Taconique) qu’à l’ouest (Adirondacks). Après avoir découvert le Québec (la Nouvelle-France), en 1609, l’explorateur Samuel de Champlain lui a donné son nom après avoir navigué sur la rivière Richelieu. À l’époque coloniale, le lac Champlain servait de voie de communication entre les vallées du Saint-Laurent et de l’Hudson. Plusieurs affrontements ont eu lieu entre les troupes de la Nouvelle-Angleterre et de la Nouvelle-France, puis entre les rebelles américains et de la fière Albion. Des batailles ont eu lieu sur le lac, comme à l’île Valcour en 1776 et en 1814 lors de la bataille de Plattsburgh. Si vous aimez pratiquer la plongée, vous pourrez observer plusieurs épaves dans les profondeurs du lac Champlain, dont trois sont dans la réserve historique du Vermont, dans le port de Burlington; d’autres sont autour de l’île Schuyler. Vous pourrez aussi observer le Horse-powered Ferry au large de North Beach et le Phoenix près de Colchester Shoal (pour plongeurs expérimentés). Si l’histoire vous intéresse, vous pouvez également visiter le fort Ticonderoga, le Champlain Memorial Lighthouse et le Lake Champlain Maritime Museum.

Le Friend Ship devant l’île La Motte. Crédit photo : Claude Laprès.

Pourquoi les Québécois aiment-ils tant naviguer sur le lac Champlain?

Le lac Champlain est riche en paysages et en lieux à découvrir. Il est tellement grand qu’il y aura toujours un endroit à explorer! Comme le développement résidentiel y est limité, il y a des endroits qui sont restés sauvages où vous pourrez vous ancrer paisiblement (sauf pendant les vacances de la construction). Sans compter tous les beaux couchers de soleil que vous aurez le plaisir de voir soir après soir. Les maisons de pierres centenaires sur le rivage rocheux de l’Isle La Motte valent particulièrement le détour, tout comme la Hyde Log Cabin, une cabane en rondins construite en 1783 sur Grand Isle. Pour tout savoir sur les activités à faire dans la région, visitez le www.lakechamplainregion.com. Vous pourrez vous baigner, passer l’après-midi à la Plattsburgh City Beach (dans la baie de Cumberland) ou à North Beach Park (Burlington), pratiquer des sports nautiques et pêcher plus de 80 espèces de poissons tels la perchaude, le doré et l’achigan à grande bouche. Si vous n’avez rien à faire, vous pourriez même partir à la recherche de Champ, le monstre mythique du lac, qui serait un lointain cousin du monstre du Loch Ness.

Shore Acres Inn and Restaurant, North Hero, Vermont. Crédit photo : Gratien Courtois.

Comment s’y rendre?

En voiture, pour vous rendre à Plattsburgh et dans l’État de New York, vous devrez prendre l’autoroute 15 sud, puis la 87 sud et passer les douanes à Saint-Bernard-de-Lacolle. Si vous aimez mieux vous rendre au centre du lac, le meilleur chemin est de prendre la route 225, de vous arrêter aux douanes de Noyan et de poursuivre votre chemin sur la route 2 aux États-Unis. Si votre destination est Burlington, vous devriez prendre la route 133 pour passer les douanes à Saint-Armand / Philipsburg et continuer sur la 89 sud.

En bateau, si vous arrivez par le fleuve Saint-Laurent, vous devrez remonter la rivière Richelieu et faire une escale au quai des douanes américaines, près du fort Montgomery, à Rouses Point, où vous devrez passer les douanes. Vous devrez avoir vos amarres et n’attendez aucune aide de la part des douaniers. Vous devrez avoir votre passeport en votre possession en tout temps. Si vous allez souvent aux États-Unis, la carte Nexus pourra vous faire gagner bien du temps d’attente aux douanes.

Avant de naviguer sur le lac Champlain, vous devrez avoir enregistré votre bateau et votre annexe, tout ce qui a un moteur, peu importe sa puissance. Vous devrez aussi avoir un permis d’embarcation de plaisance, sans oublier votre carte de conducteur.

Tous les bateaux de plus de 9 m (30 pi) doivent arborer un autocollant, le Custom Decal Fee, au coût de 27,50 $ US par année. Le formulaire à remplir pour l’obtenir est le 339V. Si vous ne l’avez pas, vous pourriez être obligé de payer une amende pouvant aller jusqu’à 5 000 $.

Sloop Cove, Île Valcour. Crédit photo : Gratien Courtois.

Avitaillement et bagages

Luc Bernuy vous suggère fortement de faire votre épicerie aux États-Unis. Vous éviterez de vous faire confisquer votre nourriture aux douanes américaines. Si vous souhaitez tout de même faire votre épicerie au Canada puisque le taux de change n’est pas à notre avantage ces temps-ci, visitez le www.cpb.gov pour savoir ce que vous avez le droit d’apporter. En général, les agrumes sont interdits, mais les mets préparés sont acceptés.

Smugglers Bay, Île Valcour. Crédit photo : Gratien Courtois.

Lois locales et règlements

L’État du Vermont et celui de New York ont leurs propres lois et règlements. Pour en savoir davantage, visitez leur site web respectif. De façon générale, la Garde côtière aux États-Unis exige que toutes les embarcations de plaisance aient à bord des dispositifs de flottaison ou VFI pour tous les occupants. Dans l’État de New York, les jeunes de moins de 12 ans doivent le porter en tout temps lorsqu’ils sont sur l’eau; dans l’État du Vermont, la loi est plus sévère et vise les 16 ans et moins. Il est obligatoire que vous ayez une toile orange à utiliser en cas de détresse. Si vous êtes né après 1974, vous devez avoir votre carte de conducteur d’embarcation de plaisance. Le taux d’alcool permis est de 0,08 %; pour la consommation de drogue, il n’y a aucune tolérance. Votre réservoir d’eaux usées doit être en règle puisque cela est vérifié souvent sur le lac Champlain. Aucune décharge d’eaux noires n’est permise; l’installation doit être en conséquence. De plus, vous devez circuler à un maximum de 8 km/h (5 MPH) si vous êtes à moins de 60 m (200 pi) de la rive. Il est aussi interdit de rester à l’avant lorsque le bateau navigue, sauf pour faire des manœuvres en voilier.

Avant de partir, vous pouvez poser vos questions à un shérif ou à un agent de la Garde côtière. Vous pouvez même lui demander une visite de courtoisie pour vous assurer que votre bateau est conforme. Si vous êtes intercepté sur l’eau, enlevez vos lunettes de soleil. Soyez prêt à donner vos amarres, restez courtois, ne répondez qu’aux questions des agents et ne faites pas de blagues.

Bateau aperçu à Burlington. Crédit photo : Gratien Courtois.

Navigation et météo

Selon Luc Bernuy, le lac est bien balisé et il est possible de naviguer à vue; c’est donc simple. Par contre, faites attention à l’approche des îles, car il y a beaucoup d’algues après la mi-août. Et surtout, ne frôlez pas les balises! Il y a trois lignes de traversiers sur le lac. Selon la situation, vous devrez les contourner.

Avant de quitter le quai, vous devez connaître la météo. Pour ce faire, vous pouvez consulter les prévisions de MétéoMédia (www.meteomedia.com) ou du National Weather Service (www.wheather.gov/bvt/recreation). Sur la radio VHF, vous devez syntoniser le WX2 (NOAA) où les informations sont répétées toutes les 10 minutes. Vous pouvez aussi utiliser une application avec un radar pour savoir ce qu’il se passe en temps réel puisqu’il y a plusieurs microclimats sur le lac Champlain. La hauteur des vagues variera pendant la belle saison entre 0 et 4 pieds, selon l’endroit où vous vous trouverez. La météo peut parfois être capricieuse avec des vents changeants d’une journée à l’autre, passant du nord au sud. En général, les vents proviennent du SSO (40 %) et du NNO (30 %), mais rarement de l’ouest et encore moins de l’est. Les montagnes créent un effet d’entonnoir dont il faut se méfier, tout comme des tempêtes soudaines et des grains en été.

Luc Bernuy vous suggère d’utiliser une ancre pesant une livre par pied de bateau avec une chaîne égale au moins à la longueur du bateau et du câblot, totalisant cinq à sept fois la profondeur, afin de rester bien ancré à votre mouillage lorsqu’il y a des vents forts ou des coups de vent. Si le vent provient du sud, allez vous abriter à Monty’s Bay; vous serez alors bien protégé. Un autre bel endroit où faire escale est Deep Bay. La baie est étroite et offre une excellente protection lorsque Dame Nature se déchaîne. Vous pourrez y trouver plusieurs ancrages (mais arrivez tôt!) et vous promener dans le Point Au Roche State Park.

C’est le temps de relaxer à Nichols Point Bay. Crédit photo : Gratien Courtois.

Les marinas

Le lac Champlain compte une quarantaine de marinas. Les préférées des Québécois sont surtout situées au nord-ouest, comme North Hero Marina et Mooney Bay Marina. Au sud, il y a Westport Marina. À Treadwell Bay, vous obtiendrez une protection complète contre les vents dominants. Par contre, il y a seulement cinq pieds de tirant d’eau dans le chenal d’entrée. C’est pourquoi sa clientèle est surtout constituée de propriétaires de bateaux à moteur. Vous devrez réserver tôt votre emplacement, car la majorité des marinas ont une liste d’attente. Pour en savoir davantage, vous pouvez vous procurer le Cruising Guide to Lake Champlain.

Les Québécois sont surtout présents au nord et au centre du lac Champlain parce que la distance à effectuer à partir du Québec est moindre que s’ils décidaient de choisir une marina dans le sud. Les villes de Plattsburgh et de Burlington leur offrent beaucoup de commodités, sans oublier la vie sociale qui y est bien présente. Les gens s’entraident, discutent et se saluent. Les tarifs varient d’une marina à l’autre, mais cela peut s’avérer dispendieux, compte tenu du taux de change actuel. En guise d’exemple, le tarif à Mooney Bay Marina est de 80 $ US/pied comparativement à 135 $ US/pied à Snug Harbor Marina.

Wesport Marina. Crédit photo : Gratien Courtois.

Location

Il est possible de louer un voilier sans capitaine avec Voile sans frontière et avec ou sans capitaine avec Navtours. Vous aurez à respecter un contrat de location, des franchises et à payer pour une assurance. Lisez tous les documents avant de signer et de partir. Il pourrait y avoir des restrictions et des limites de navigation. Vous pouvez négocier d’obtenir le remboursement de la caution dès votre retour à quai. Vous devrez déclarer être un plaisancier expérimenté et compétent, et le courtier peut se réserver le droit d’imposer un capitaine. Privilégiez les compagnies qui possèdent plusieurs embarcations et méfiez-vous des particuliers. Vous pourriez avoir de mauvaises surprises : un bateau en mauvais état, de l’équipement manquant, etc.

Plattsburgh. Crédit photo : Claude Laprès.

Les mouillages

Voici les endroits où s’ancrer choisis par Luc Bernuy en fonction de la météo et de la saison (achalandage). Les lieux populaires sont bondés la fin de semaine en juillet et en août, mais il existe des alternatives.

Les ancrages populaires – Alternatives

  • Deep Bay – Treadwell Bay ou Nichols Point
  • Valcour – Bluff Point (nord ou sud) ou Providence
  • Mallets Bay – Les baies en face ou Burlington Nord ou Willsboro
  • KingsLand – Converse

Les mouillages coup de cœur

  • Cole Bay
  • Partridge Harbor
  • Converse
  • Willsboro (les vents proviennent souvent du nord)
  • Providence (les vents proviennent du sud; assurez-vous d’être bien ancré!)

Périmètres de navigation

Si vous souhaitez naviguer sur le lac Champlain en bateau à moteur, seuls votre budget d’essence, la météo ou l’état du lac pourront vous arrêter dans votre exploration. Si vous êtes à voile, en une fin de semaine, vous pourrez naviguer jusqu’à 10 à 15 milles nautiques de votre lieu de départ. Si vous avez une semaine de libre, ce sera environ de 30 à 45 milles nautiques de votre lieu de départ et si vous êtes en vacances pour deux semaines : le lac vous appartient!

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De gauche à droite : Luc Bernuy et Mario Mercille. Crédit photo : Joani H0tte-Jean.

Merci à l’École de navigation de plaisance de la Société de sauvetage de m’avoir permis d’assister gracieusement à la conférence Navigation au lac Champlain. Luc Bernuy y donne aussi d’autres conférences, soit La préparation mentale pour le départ, Objectif Sud et Navigation aux Mille-Îles ainsi que des cours réguliers tels que la Navigation côtière et Navigation de plaisance. Vous avez des questions? N’hésitez pas à communiquer avec lui au luc.bernuy@videotron.ca. Je vous invite également à consulter l’horaire complet de la vingtaine de cours et ateliers de l’École sur son site internet : www.coursdenavigation.com. Vous trouverez aussi beaucoup d’échanges et d’informations sur la page Facebook Les Voileux du lac Champlain.

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Gilles-Philippe Delorme.

Le 11 mai 2018, dans le cadre des conférences maritimes et environnementales, l’association Voiles de l’Amitié présentait une conférence sur le lac Champlain avec l’animateur, navigateur et plaisancier. Au cours de la soirée, ce dernier a partagé avec les participants des anecdotes vécues sur ce plan d’eau avec son voilier La démone.

Voilier La démone.

Il vous conseille notamment d’avoir des cartes nautiques à jour et de rester vigilant près de Point au Roche où il semble y avoir beaucoup d’eau, puis à un certain moment, il ne vous restera que deux pieds sous votre coque! Il y a deux bouées qui indiquent cet emplacement et il ne faut pas les manquer! Puis, nous avons regardé un intéressant documentaire tiré de la série Mer et monde, diffusée à Canal D, de 1998 à 2002.

Par Joani Hotte-Jean

*Cet article a été publié dans le magazine Été 2018 de Québec Yachting. Abonnez-vous, c’est GRATUIT!