Québec Yachting

Un sport en pleine évolution – La motomarine, d’hier à aujourd’hui – Partie II

Sea-Doo RTX 215 2008

Remorque pour motomarine ADV TEC iCATCH 2010

Sea-Doo RXT iS 2012

Système de servodirection assistée haute tension (O.P.A.S.)

Synonyme de concurrence accrue au cours des années 90, la motomarine a même établi sa propre niche au sein du marché de la plaisance. Vu que Kawasaki avait été le premier fabricant à populariser ce sport avec son modèle Jet Ski, la majorité des utilisateurs avaient l’habitude d’utiliser l’appellation « Jet Ski » pour désigner une motomarine, et ce, quelle qu’en soit la marque (certains continuent d’ailleurs à le faire de nos jours). Pendant un certain temps, un magazine américain sur la plaisance a même insisté pour qu’on lui donne le nom de « water bike ». Bombardier, quant à lui, dans sa brochure de 1968, parle d’un « scooter des mers ». Les fabricants ont fini par s’entendre sur l’appellation « motomarine » en français ou « personal watercraft » en anglais. Une association a d’ailleurs été formée aux États-Unis, qui porte le nom de Personal Watercraft Industry Asssociation (PWIA). Ainsi est née l’abréviation « PWC » en anglais ou « motomarine » en français. 

Tout en se livrant une concurrence féroce lors des salons nautiques et à travers leurs réseaux de concessionnaires à travers le pays, les fabricants canadiens de motomarines travailleront de concert afin de favoriser ce nouveau sport et en tentant de le mettre à l’abri de réglementations qui pourraient l’empêcher de poursuivre sa croissance.

En 1990, Bob « Goose » Gossling, directeur régional des ventes pour Sea-Doo, décide d’organiser un événement médiatique devant avoir lieu chaque année, au mois de mai, à Muskoka. La réunion printanière est ouverte à tous les fabricants de motomarines. De plus, elle permet à un groupe de chroniqueurs de magazines de plaisance d’examiner de plus près les nouveaux modèles de motomarines, soit juste à temps pour leur édition estivale.

Gossling, qui a récemment pris sa retraite chez Bombardier, est convaincu que ces événements ont permis, pendant les années 90, aux acteurs de l’industrie de mieux travailler ensemble. En 1991, l’industrie de la motomarine sera blâmée en raison de plusieurs accidents reliés à des questions de sécurité pour les conducteurs de motomarines. En vue de régler ce problème, Bombardier fera la promotion d’un Centre de formation en motomarine. Ainsi, dans un délai de trois ans, l’initiative sera adoptée par les joueurs importants de toute l’industrie.

Sous l’insistance de Gossling, Bombardier continue à promouvoir la formation en matière de sécurité, notamment en apportant son soutien à la rédaction du Manuel du motonautiste de l’Escadrille canadienne de plaisance. Bombardier commence également à prêter des motomarines Sea-Doo à divers services policiers ainsi qu’à des agences maritimes, permettant ainsi une meilleure application des lois tout en offrant une visibilité accrue à la motomarine.

Pendant les années 90 et au début du nouveau millénaire, l’industrie de la motomarine se heurtera à diverses formes de lois et règlements susceptibles de limiter l’accès des motomarines sur certains lacs et autres plans d’eau. La plupart échoueront, bien que certaines interdictions demeurent en vigueur dans plusieurs parcs nationaux des États-Unis. En outre, en 1999, quand le gouvernement canadien adoptera son Règlement sur la compétence des opérateurs d’embarcations de plaisance (CCEP), qui exige que tout conducteur ait une preuve de compétence à bord, les motomarines seront dans une classe à part. En effet, le conducteur devra avoir au moins 16 ans. La PWIA préconise maintenant une réglementation semblable.

Constatant l’intérêt grandissant du grand public envers le sport de la motomarine, les fabricants décident donc de participer davantage aux compétitions d’envergure. Ainsi, Bombardier, Kawasaki et Yamaha forment des équipes de course pour lutter sur le circuit nord-américain de l’IJSBA.

Tout en permettant aux fabricants de se glorifier en remportant des épreuves, les compétitions de motomarines contribuent également au développement de la motomarine, puisque les équipes de course agissaient de façon pleinement autonome. Parmi ces principaux développements, notons celui de l’Odyssey Racing Team, commanditée par Sea-Doo et dirigée par le coureur Dale Vranckx (devenu concessionnaire Sea-Doo par la suite). L’équipe a en effet découvert que l’ajout d’ailerons améliorait de façon spectaculaire les performances dans les virages. En plus de permettre à l’équipe de remporter des épreuves, ces ailerons seront ensuite ajoutés aux modèles Sea-Doo en production.

La saison 1992 est électrisante pour Bombardier, alors que Bo Dupriest remporte le titre national du Pro Runabout de l’IJSBA sur sa motomarine Sea-Doo; il répète même l’exploit en 1994. Les Championnats du monde de l’IJSBA, en 1994, à Lake Havasu en Arizona, sont également marquants, alors que Brad Lockhart, de l’équipe Odyssey, remporte le Pro Runabout Slalom. Une publicité produite par Bombardier le printemps suivant rappellera que la victoire de Lockhart avait été « difficile à avaler » par ses adversaires. En fait, ce qui les avait piqués au vif  est qu’il conduisait une Sea-Doo GTX, un modèle à trois places reconnu pour son confort, sa stabilité et sa facilité de conduite. Cette victoire prouve encore une fois que les modèles à trois places représentent les motomarines du futur pour cette industrie.

La plupart des avancées technologiques que nous connaissons aujourd’hui étaient encore à venir à cette époque. Grâce à leur faible poids et leur fiabilité, les moteurs à deux temps dominaient durant les années 90. Toutefois, au début du nouveau millénaire, les normes plus strictes en matière d’émissions ainsi que le souci d’une meilleure efficacité énergétique poussèrent Sea-Doo, en 2001, à lancer ses moteurs à quatre temps Rotax 4-TEC.

En 2002, lors du Salon nautique international de Miami, la GTX 4-TEC remporte le prix Innovation décerné par la NMMA. Ce modèle est alors équipé du système de servodirection assistée haute tension (O.P.A.S.) de Sea-Doo, une mesure de sécurité qui permet au conducteur de mieux maîtriser la motomarine lorsque le moteur est coupé.

Les moteurs à quatre temps auront vite fait d’être utilisés pour toutes les gammes de modèles Sea-Doo ainsi que celles des autres fabricants de motomarines. Les limiteurs de sur-régime électroniques aideront également à réduire le niveau sonore des machines. Puis la suralimentation fera son apparition pour la première fois sur le moteur de 185 ch de la GTX 2003 GTX, améliorant ainsi son rendement, sa vitesse et son accélération, et ce, sans augmentation notable de poids.

L’industrie de la motomarine, dans son ensemble, avait gagné en maturité malgré qu’elle ait dû faire face à un marché craintif depuis son sommet de ventes en 1995, alors que 200 000 modèles avaient été vendus à travers le monde. Jusqu’à 2002, ce nombre avait baissé à 79 300 unités vendues. Dans la seconde moitié des années 90, MasterCraft retirait la WetJet du marché. Puis ce fut le tour d’Artco, en 2000, avec la Tigershark, et de Polaris, en 2004, qui quittait le marché pour se concentrer sur sa production de motoneiges et de véhicules tout terrain. Quant à Honda, après avoir accédé tardivement au marché de la motomarine avec son modèle AquaTrax en 2002, il en cessait la production en 2011.

Dans un contexte de rétrécissement de leurs parts de marché, les fabricants de motomarines favorisent l’émergence de technologies de plus en plus conviviales pour le conducteur, par exemple l’introduction d’un régulateur de vitesse ainsi que des moteurs plus puissants et plus performants. Sea-Doo, l’initiateur d’une autre tendance avec son moteur suralimenté pour son modèle GTX en 2003, fait de même avec la RTX en 2008, un modèle d’une puissance de 215 ch.

En 2012, Yamaha riposte avec ses modèles FX SHO, FZR et FZS. Même si le fabricant ne spécifie pas dans sa documentation quelle est leur puissance en chevaux, il est évident qu’elle est supérieure à 200 ch. Ajoutons à cela la monstrueuse Kawasaki 300X avec son moteur à quatre temps suralimenté de 1498 cc, d’une puissance de 300 ch.

Pour le meilleur ou pour le pire, les fabricants de motomarines se mettront alors d’accord avec la Garde côtière américaine afin de limiter la vitesse de leurs modèles à 65 mph. Malgré tout, au moyen d’une simple modification apportée au système d’admission d’air du moteur ou encore à l’aide d’un ordinateur, il sera facile d’augmenter la vitesse de plusieurs modèles au-dessus de 70 mph.

Pour ceux qui recherchent la performance, la vitesse est importante. Cependant, la plupart des propriétaires de motomarines s’intéressent beaucoup plus de nos jours à des modèles faciles à manœuvrer et qui consomment moins d’essence, tout en étant confortables et amusants à conduire. La mobilisation engendrée par l’organisation de tournées et de clubs de motomarines au cours des années 90 a permis de faire éclore une nouvelle génération d’adeptes qui préfèrent la randonnée et la pratique des sports nautiques plutôt que la vitesse.

Des aventuriers et des professionnels de la course ont clairement prouvé que la motomarine était capable de parcourir de très longues distances. Par exemple, en 2002, l’aventurier espagnol Alvaro de Marichalar traversera l’océan Atlantique en près de quatre mois sur un modèle Sea-Doo XP. Il conduit alors sa motomarine entre 12 et 14 heures par jour, se réapprovisionnant en essence à partir d’un bateau de soutien et dormant sur un radeau de sauvetage. Pour sa part, en 2009, le coureur canadien Dale Vranckx établit un record mondial de vitesse Guinness en parcourant la plus longue distance possible en une période de 24 heures, soit 786 milles (1265 km) en 16 heures avec sa motomarine. L’action se passe à Long Point Bay, sur le lac Érié. Le record est battu un an après par un autre coureur de l’équipe Sea-Doo, sur un canal de la Floride.

Tim McKercher, consultant en Relations médias pour BRP et ancien coureur d’essai, a effectué un nombre incroyable de tournées pour les produits Sea-Doo. Il a aussi accompagné Ted Rankine, animateur de l’émission télévisée PowerBoat, lors d’une randonnée en Alaska à bord d’une motomarine Sea-Doo. Le voyage a été effectué en 1998 en direction d’une petite île dans l’Arctique, du côté de la Russie. Rankine a également traversé le Gulf Stream entre la Floride et les Bahamas. Pour les adeptes d’aventures en motomarine, le potentiel est donc sans limites.

La motomarine est également parfaite pour la pratique des sports de glisse, spécialement quand elle est équipée d’un mât de remorquage, comme le modèle Wake de Sea-Doo. Certains pêcheurs sportifs l’utilisent même pour la pêche côtière ou dans des endroits éloignés. Un site Web (Jetskifishing.co.za) rapporte régulièrement les exploits d’un groupe de pêcheurs de la Nouvelle-Zélande qui ont équipé leurs motomarines pour la pêche en mer. Ils attrapent de gros poissons-trophées, et ce, dans toutes sortes de conditions.

BRP (Bombardier Produits Récréatifs), qui a acquis les droits de production des modèles Sea-Doo de la firme Bombardier en 2003, mise sur le confort et la sécurité en 2008 en mettant au point sa technologie révolutionnaire iControl, qui comprend les systèmes ITC (accélérateur intelligent), iS (suspension intelligente) et iBR (freinage et marche arrière intelligents).

Le côté performance des motomarines n’est cependant pas négligé pour autant. En 2010, la RXT-X 260, dotée de la nouvelle coque S3, est équipée d’un moteur d’une puissance de plus de 260 ch. La même année, BRP lance sur le marché sa remorque Advanced TEC iCatch, équipée d’un système automatique d’attache et de déchargement. Cette dernière ainsi que la RXT-X 260 remportent des prix de la NMMA en 2010 dans leur catégorie respective.

BRP a récidivé l’an dernier en remportant un autre prix Innovation décerné par la NMMA pour son modèle Sea-Doo 2012 RXP-X 260, grâce à son siège au confort maximal Ergolock et sa coque T3 plus réactive.

Même si la tendance générale à laquelle on assiste sur le marché de la motomarine s’oriente vers la randonnée et les sports de glisse, BRP ne peut résister à la tentation de plaire également aux amateurs de vitesse. La performance est inscrite dans l’ADN des modèles Sea-Doo de BRP et c’est la raison pour laquelle ces motomarines continuent d’accumuler des récompenses.

Peu importe ce que l’avenir réserve à la motomarine, une chose demeure : c’est qu’elle continue de procurer à la fois des montées d’adrénaline à ceux qui recherchent la performance ainsi que du plaisir à volonté pour ceux et celles qui veulent s’amuser sur l’eau en famille.

La suite de ce reportage sera mise en ligne à la fin du mois d’août 2013.

Ce texte a été publié dans le magazine Printemps 2013 de Québec Yachting.