Québec Yachting

Jeanneau Prestige 450 Fly

Seules les ailes lui manquent

Un palais en miniature selon certains. Ce qui est sans doute exagéré. Mais le nouveau Prestige 450, et surtout le Fly de la série, possède tous les attributs d’une suite dans un hôtel de luxe. Prestations de très haut de gamme, capture du décor, marque de goût et de raffinement dans le choix des formes et des couleurs, sens du détail invisible : la qualité de vie qu’offre cette somptueuse vedette appartient incontestablement à l’univers des privilèges en série. Naturellement, cet avantage se paie, mais la silhouette d’une rare élégance de ce bateau bichonné par les designers de Garroni suffit à l’affranchir de la meute incertaine des insectes surmotorisés qui hantent toutes les baies du monde. Bien sûr, le 450 ne peut quitter l’allure un peu trapue du genre auquel il souscrit, mais la puissance qu’il recèle et la vie soyeuse qu’il promet à bord sont comme des ailes.

Le parti pris est dès l’abord audacieux : ici la sacro-sainte plage arrière exposée à tous les soleils cède (un peu) son espace ouvert à celui du carré. Renonciation de pure forme. Le flybridge accueille les passagers en tenue légère, plus hauts et mieux abrités des regards comme des embruns.

Ici règnent la puissance et l’harmonie

Un carré qui donne le ton au premier coup d’œil : hautes portes coulissantes, fenêtres qui n’ont plus rien du hublot élargi, banquettes profondes aux tons ivoire (peut-être un peu salissant…) boiseries aux reflets d’acajou : tout est fait pour capturer le spectacle de la mer avec le confort d’une grand-chambre de capitaine de frégate. Ici règne l’harmonie.

Le poste de timonerie laisse deviner la puissance dont dispose son titulaire. Embrassant l’horizon d’un regard que rien n’encombre, le préposé à la route a aussi tous les instruments de navigation sous les yeux, y compris le renvoi de cartes nautiques sur un large écran fixe et, surtout, les deux compte-tours moteur. Car ce sont bien les deux D6 Volvo 435 ch (il existe une version plus « modeste » à 2 x 370 ch) qui font la loi. Sans tapage superflu : les six cylindres sont d’une discrétion exemplaire).

Le système de propulsion adopté par Jeanneau pour cette série est le pod, dont le bloc hélice-cage orientable supprime l’utilité du gouvernail tout en évitant de faire travailler les pales dans la zone de turbulence de la coque. Il permet également des variations d’allure plus rapide et facilite les manœuvres au port en remplaçant puissamment les propulseurs transversaux. En termes de consommation, le Volvo (IPS 600) en vitesse de croisière à 25 nœuds demande environ 98 litres/heure pour 295 milles nautiques d’autonomie et 148 litres/heure à 33 nœuds avec 275 milles d’autonomie. L’indication constructeur est donnée pour un déplacement à mi-charge.

Un escalier d’accès par cabine

Une seconde timonerie, olympienne, occupe un angle du flybridge, laissant un vaste espace aux banquettes passager qui dominent l’horizon et leur offre un dôme de sensations envoûtant.

Mais ce sont les cabines-suite qui éblouissent le regard. Les deux (ou trois) espaces propriétaires et VIP disposent d’un accès par escalier séparé, distinguant nettement les intimités à bord. La première, dans la partie avant, offre un lit de très grand format, que la hauteur sous barrot permet de jucher loin du plancher, gage de grand confort. Deux longues ouvertures de chaque côté de la coque laissent l’œil baguenauder sur les côtes défilantes. Les tons de la boiserie, caramel et acajou, chaleureux, presque charnels, habillent de nombreux tiroirs et une véritable penderie. L’éclairage naturel vient de partout, y compris du plafond, relayé par des lumières encastrées aussi discrètes qu’efficaces. Dans la cabine centrale, où le lit est placé en travers de l’axe proue-poupe, les revêtements sont plus clairs, sauf dans la salle de douche. Cette dernière est séparée et vitrée, empêchant toute projection, et le caillebotis de plancher contribue à apporter une note exotique à l’ensemble. L’agencement de cet espace capital pour le confort à bord est maîtrisé avec une rare élégance. Le lavabo tenant plus de la vasque, les toilettes sont habillées de tablettes en bois découpé, le tout baignant dans la lumière d’une fenêtre percée d’un hublot pour assurer l’aération. En croisière, la capacité de 500 litres du réservoir d’eau limite les angoisses de pénurie.

Enfin, pour les allers et retours à terre, la plateforme arrière se dégage sur vérins et livre l’accès à un coffre d’une impressionnante capacité où se loge sans difficulté une annexe équipée d’un moteur. On regrette un peu l’absence de bossoirs qui permettraient de la garder prête à servir au bout de ses potences, mais c’est peut-être bien le seul sacrifice à consentir sur ce bateau exceptionnel.

On garde du Prestige 450 un souvenir de luxe et de volupté promise, le confort en navigation que seule une carène en V évolutif peut offrir, une stabilité de route étonnante grâce aux larges redans et, en définitive, l’impression générale d’un bateau soigné jusqu’au moindre détail. Probablement l’une des plus belles réussites des chantiers français de l’année.

FICHE TECHNIQUE

Longueur hors tout : 45 pi 9 po / 13,96 m
Longueur de coque : 41 pi 2 po / 12,56 m
Largeur : 14 pi 1 po / 4,3 m
Tirant d’eau : 3 pi 7 po / 1,1 m
Déplacement lège : 24 251 lb / 11 000 kg
Réservoir d’essence : 317 gal US / 1200 litres
Réservoir d’eau : 137 gal US / 520 litres
Motorisation : IPS 500 : 2 x 370 ch / IPS 600 : 2 x 435 ch

Par Thierry Montoriol

* Essai provenant de la parution Essais 2014 du magazine Québec Yachting.